Concours d'éloquence

Concours d’éloquence « Charles Piketty » : le bon cru 2024

Il est 18 heures ce jeudi 23 mai quand les finalistes du concours d’éloquence « Charles Piketty » arrivent à la mairie du XVIe arrondissement de Paris…

Ils étaient 10 encore en lice. 10 finalistes sur les 63 élèves de la seconde à la terminale à s’être présentés au prestigieux concours d’éloquence « Charles Piketty » de Saint-Jean de Passy, 10 finalistes sélectionnés. Dans la prestigieuse salle des fêtes de la mairie du XVIe arrondissement ce jeudi 23 mai, ils serrent entre leurs doigts les quelques feuilles bleues sur lesquels ils ont jeté les notes de leur discours. Ils sont anxieux parfois, mais heureux d’être là.

« C’est un très bon entrainement, je sais que ça me sera très utile dans la vie, explique Augustin, élève en 1ère. L’année dernière, je suis arrivée second. Chaque fois, c’est un plaisir immense de s’affronter à des thématiques difficiles, des sujets auxquels je n’avais jamais réfléchi ». Il ajoute : « Je suis assez impressionné par le niveau ».

Dans les coulisses

La veille, à 13h, ils ont tiré au sort deux sujets, en ont choisi un et se sont installés le lendemain à 14h au 63 de la rue Raynouard pour préparer les 7 minutes que doit durer leur intervention. Ce 10ème Concours d’éloquence est placé sous l’égide de Saint Thomas d’Aquin. Pour les aider à plancher par exemple sur : « Comme dit saint Grégoire : ‘Nous soumettre humblement à la voix de l’autre, c’est nous élever intérieurement au-dessus de nous-mêmes’ » ou bien « Le meilleur gouvernement est celui d’un seul » ou encore « Si l’empereur donne un ordre et Dieu un autre, méprise le premier, c’est à Dieu qu’il faut obéir », des documents sont à leur disposition, Internet mais pas de téléphone portable. Quand elle découvre son sujet, Marguerite est un peu désemparée parce que c’est une phrase de Saint Augustin qui lui échoit alors qu’elle attendait Saint Thomas : « Pourtant, j’ai su que le sujet allait m’inspirer ». De son côté, Gaspard est plutôt content : « C’était faisable, je me suis dit que c’était possible ». En effet…

A 18h, ils se rendent ensemble à la mairie du XVIe. Certains arpentent, texte en main, le salon aux murs surmontés de peintures qui jouxte la salle des fêtes où déjà le jury s’installe. Un jury prestigieux présidé par Jean Sévillia, écrivain et journaliste, qui rappelle aux candidats que « l’art de la parole est un art très ancien, l’art de la rhétorique ». Puisant chez Aristote, il décrit cet art qui passe par le pathos, le sentiment, l’éthos, la dimension morale du discours et le logos, les mots s’adressent à la raison. « Ce n’est pas le tout de bien parler, il faut penser juste », explique-t-il en guise de conclusion, et établissant Saint Thomas d’Aquin au pinacle des penseurs de l’occident, il exhorte les lycéens : « En le suivant vous penserez bien, vous penserez juste ».

Le pouvoir des mots

Déjà la première candidate s’avance vers le pupitre. Et au fur et à mesure que la nuit tombe, sur l’estrade entourée de colonnes, les élèves se succèdent. Mila est en terminale, les deux années précédentes, elle n’a pas osé se lancer. Quand vient son tour, elle est « super stressée » : le concours d’éloquence, explique-t-elle, « c’est un défi que je me suis fixé à moi-même parce qu’aujourd’hui, il est très important de savoir défendre ce qu’on pense, d’avoir confiance en soi et je trouve ces cours de rhétorique super importants ». Marguerite à son tour connait « le pouvoir des mots », elle raconte : « Je voulais savoir si je pouvais en user avec talent ». Elle ajoute : « Je ne pensais pas avoir la capacité de le faire. Quand je vois le talent des autres, je suis honorée de faire partie des finalistes. Être là ce soir, c’est très impressionnant ».

Les interventions sont suivies de 3 minutes de questions du jury.

Certains élèves sont venus avec un fan club bien organisé. L’amitié fait partie des points forts de ce concours, et lorsqu’ils retournent à leur place, des lycéens brandissent à l’occasion des pancartes et ponctuent le concours de tumultueux applaudissements.

Les lauréats

Pendant le cocktail, les membres du jury s’éloignent pour délibérer. Quand tout le monde reprend place dans la grande salle, Jean Sévillia annonce les résultats : Gaspard Frileux (16), 3e, Marguerite Guillaume (05), 2de, Mila Le Moënner (01), 1ère. La joie autant que la surprise se lit sur le visage des lauréats.

« J’avais déjà fait le concours l’année dernière mais je n’avais pas été sélectionné. J’ai voulu retenter ma chance, explique Gaspard. Je pensais que ce serait plié… je suis super content ». Si vous lui demander quel est le souvenir qu’il gardera de cette soirée, il vous répondra : « L’assemblée de 200 personnes devant moi. Dans un lieu comme ça, je tremblais. Et puis… le discours, tout simplement ».